Quel est votre parcours ?
Après mon bac, je suis entrée en classe préparatoire aux grandes écoles (CPGE) physique-chimie sciences de l’ingénieur, en sachant déjà que je voulais enseigner. Ensuite, j’ai fait une licence Physique-Chimie Sciences de l’ingénieur avec une option vers les métiers de l’éducation et un stage en unité localisée pour l’inclusion scolaire (ULIS).
Enfin, j’ai suivi un master Métiers de l'Enseignement, de l'Éducation et de la Formation (MEEF) et j’ai eu le concours.
La première année, j’ai été enseignante dans une classe ordinaire en CP/CE1 puis j’ai demandé à aller en ULIS école. Après quatre ans, j’ai passé mon certificat d'aptitude professionnelle aux pratiques de l'éducation inclusive (CAPPEI) et maintenant j’enseigne depuis 8 ans, dont 7 ans en ULIS école.
Dès le début de mes études, c’était ma volonté d’être en ULIS ; ou du moins dans le champ du handicap. C’est pour cela que j’ai passé le concours. Ce poste-là me correspond très bien.
Pourquoi avez-vous choisi d’être professeur des écoles ?
Pour les relations avec les familles, le travail avec les enfants, le travail en équipe, la liberté pédagogique qu’on a de choisir ses supports dans le cadre des programmes. C’est un métier qui a du sens !
Pouvez-vous nous expliquer ce qu’est le dispositif ULIS ?
En ULIS, on accueille des enfants qui ont une notification de handicap pour les soutenir dans leur scolarité, ça peut être un trouble du spectre autistique, des retards d’apprentissage importants, des handicaps divers et variés. Dans cette école, à Albi, on reçoit des enfants avec des handicaps cognitifs.
Les élèves sont inscrits dans leur classe d’âge ou N-1 (comme s’ils avaient redoublé une fois), et ils restent autant de temps que possible dans cette classe. Mais tous les moments pour lesquels il leur est trop compliqué de suivre, ils sont en classe avec moi, sur le dispositif ULIS. Cela se définit en amont pour que ce soit le plus fluide possible : par exemple, on décide avec ma collègue que cet élève ira faire orthographe en classe ordinaire, des adaptations qui seront mises en œuvre dans ce domaine, mais fera le reste du français avec moi.
En quoi consiste votre métier de professeur des écoles en ULIS ?
Une partie de mon travail est d’être coordinatrice : je fais les emplois du temps de mes élèves pour trouver l’équilibre entre leur temps de classe, les soins et le travail de l’ULIS pour atteindre les objectifs fixés pour eux.
Mon travail consiste à accompagner les élèves lorsqu’ils ne peuvent pas être en classe. Je m’adapte à tous les élèves, je les évalue, je fixe avec eux des objectifs personnalisés et on essaie de les atteindre en trouvant des scénarios pédagogiques et des adaptations qui conviennent à chacun.
Une partie de mon travail est également de travailler avec mes collègues qui ont ces élèves dans leur classe. Par exemple, si un élève participe à la classe de géographie, je peux donner à ma collègue des pistes pour adapter son cours et je peux préparer le cours en amont avec l’élève.
Combien avez-vous d’élèves ?
J’ai 12 élèves cette année, c’est le maximum qu’on puisse recevoir mais ils ne sont jamais 12 en même temps. En général, j’en ai autour de 8 le matin et moins de 5 l’après-midi. Quand je n’en ai pas, je prends des classes ordinaires dans lesquelles il y a des élèves de l'ULIS, je fais l’anglais et les sciences avec les CE1/CE2 et de la co-intervention en français avec une collègue de CE1.
Comment devient-on professeur en ULIS ?
Pour pouvoir être titulaire d’un poste en ULIS, il faut obtenir le CAPPEI. On peut le passer en formation ou en candidat libre. Il y a une partie formation et un examen de trois épreuves : une partie sur la pratique de classe, une autre sur la personne ressource (comment accompagner les collègues dans les difficultés qu’ils peuvent rencontrer) et une dernière partie réflexive.
Qu’est-ce qui vous plait dans ce métier ?
J’aime le fait que ça ait du sens. On vise vraiment l’autonomie des élèves, à des degrés différents selon leurs capacités. Par exemple, on leur apprend à lire pour qu’ils puissent déchiffrer un menu, des panneaux… Ce qui se passe dans l’ULIS et dans l’école, encore plus que dans l’ordinaire, a un impact sur l’orientation. Selon qu’un élève va en institut médico-éducatif (IME) ou en ULIS collège, il n’aura pas forcément le même parcours de vie.
J’aime aussi l’accompagnement des familles vers l’acceptation du handicap, pour qui le parcours scolaire de leur enfant est parfois compliqué.
Enfin, j’apprécie la liberté pédagogique. C’est à moi de trouver comment tel ou tel élève peut avancer, de faire de la veille pour chercher ce qui existe, ce qui se fait, ce qui peut les intéresser...et de créer ce qui n'existe pas encore pour eux ! Il faut bien connaître chaque élève du dispositif et se dire « avec lui, quels sont les objectifs ? ».
Cette année, comment cela se passe avec les élèves ?
Tout va bien ! En ULIS, les années se ressemblent, dans le sens où l’on sait que certains élèves vont avancer plus ou moins vite que ce que l’on pensait ; mais elles sont également très différentes, car ce qu’on fait en ULIS dépend vraiment du profil des élèves.
L’avantage c’est que c’est ma deuxième année sur cette école, je la connais mieux, l’approche avec les collègues est plus facile, on a des habitudes de travail. J’ai les mêmes élèves jusqu’à ce qu’ils sortent du dispositif, je les connais et ils me connaissent. Et cela c’est précieux, ce qui a été impulsé dans le groupe et avec chacun d'eux, on le retrouve d’une année à l’autre.
Quelles sont les différences et les similitudes entre professeur des écoles en ULIS ou en classe ordinaire ?
Les points communs sont le travail avec les enfants, les programmes et les compétences du socle. Cependant, en ULIS, le travail est individualisé.
Mais il y a des spécificités dans la communication avec les élèves et dans l’accompagnement des familles par exemple, car en ULIS on se projette assez tôt dans le projet de vie de l’enfant, dans l’orientation, pour savoir si l’enfant se dirigera plutôt vers une SEGPA, vers un IME, vers une ULIS collège, vers une classe ordinaire etc.
Il y a aussi un travail plus important avec les différents partenaires comme par exemple les centres médico-psychologiques, les orthophonistes, les AESH.
Votre devise dans la vie ?
« Ils ne savaient pas que c’était impossible, alors ils l’ont fait ».
Un livre qui vous a marqué ?
Betty de Tiffany McDaniel
Votre mentor ?
Personne de connu, mais plusieurs collègues ou amies enseignantes m’ont influencée et aidée à trouver ma posture dans mon métier. Une éducatrice spécialisée avec qui j’ai beaucoup travaillé pendant mes trois premières années a partagé avec moi le regard qu’elle porte sur les élèves, son expertise (une partie !) et l’importance du partenariat école-famille-soins. J’ai beaucoup appris à ses côtés et je pense souvent à elle dans ma pratique de classe.
Mise à jour : mars 2023